D'Afrique en Asie ... Carnet de route

Voici mon carnet de voyage, qui me permettra de laisser mes impressions tout au long de celui-ci. J'éspère ainsi vous faire partager cette expérience, recueillir vos impressions et les nouvelles de la vie que je laisse derrière moi ... pour un temps.

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Le 1er novembre 2004, je commence un voyage de 10 mois qui me conduira vers des régions magiques que j'ai toujours voulu voir. Je veux partager avec vous ce moment de ma vie, à travers les photos et les commentaires vocaux que je posterai ici, tout au long de ce voyage.

11/07/2004

Bobodioulasso, une certaine idée de l'accueil

On dit ici que, plus on rencontre de burkinabé, plus on se rend compte de leur sens de l'accueil. Je puis vous assurer que c'est rigoureusement exact.

Rosalie Bassolé, mon hôtesse à Ouaga, avait prévenu son frère, Georges, pour qu'il m'accueille à l'arrivée. Dans mon idée, il me prenait en charge, le temps de me trouver un endroit pour dormir et me conduire chez le docteur Ouattara, chirurgien à Bobo. Comme j'avais prévenu ce dernier, tout était en ordre. Mais ce qui s'est passé montre bien cette qualité d'accueil dont je parlais en ouverture de ce chapitre.

Lorsque j'arrive au terminus de la TCV, en plein centre ville, une personne me regarde droit dans les yeux, un grand dourire auc lèvres, et me lance un "Vous êtes Pascal Nardon ?" jovial. Répondant par l'affirmative, il se présente comme étant Georges Bado. Jusque là, tout est normal. Sauf que, prenant mon sac de voyage sur l'épaule, et passant la grille de l'aire de garage du bus, j'entend sur ma gauche une personne s'exclamer : "Pascal Nardon ?". Ah, un imprévu. Je me retourne. L'homme qui se trouve devant moi est grand, d'une âge quel'on nomme d'indéterminé (la cinquantaine un peu passée, je dirais), et surtout porte sur les joues les marques tribales des Mossi. Tanguet Ouattara. Comme dans mon souvenir, lorsqu'il était de passage à Bordeaux, bien des années auparavant. Tanguet m'informe que, de garde à l'hôpital, il ne peut me consacrer que quelques minutes, son travail le réclamant. Compte tenu de mon retard d'une heure, j'apprécie le geste et me sent quelque peu gêné. Ajoutez à celà le fait que deux personnes viennet me chercher ...

A ce stade, en France, j'aurais été bien en peine de fournir une explication satisfaisant tout le monde. Ici, je n'ai même pas eu à ouvrir la bouche. Un grand éclat de rire est parti, et les deux se sont présentés l'un l'autre. Quelques secondes plus tard, tout était planifié : je pars avec Georges, et Tanguet nous suit dans sa voiture. Je logerai à l'Alliance Chrétienne, une maison d'accueil offrant quelques chambres propres et peu onéreuse (3500 CFA la nuit), le tout tenu par un pasteur et sa femme. Règlement intérieur non contrignant, si ce n'est une fermeture des portes à 22 heures que nous repoussons aussitôt à minuit, sans rencontrer de résistance supplémentaire qu'un léger temps d'arrêt. De toutes façons, tout le monde vit assez tard, compte tenu du fait qu'il fait nuit à 18 heures. Autre problème, la chambre est réservée à partir du lundi 8. Bah, on verra bien. C'est aussi cela, l'aventure ...

Je découvre ma chambre. Un grand lit avec moustiquaire (heureusement : la mienne ne possède qu'une place et n'esp as adaptée aus grands matelats), une table, une chaise, un ventilateur. La petite salle de bains, attenante, est composée d'un lavabo, d'une douche classique (encore un progrès) et de toilettes. Le temps deposer mes affaires, de vérifier que tout est fonctionnel, et nous revoilà parti. Après avoir déposé certaines affaires au pressing en face de l'Alliance Chrétienne, je prend congé du docteur Ouattara, non sans qu'il m'ait donné rendez-vous le soir pour dîner ensemble. 19 heures ? Parfait. A tout-à-l'heure. Avec Georges, nous faisons tout d'abord un rapide tour du centre ville (beaucoup plus vert que Ouaga, mais tout aussi poussiéreux, mes vêtements en témoignent), nous déjeunons ensemble sous les tonnelles d'un restaurant, dont j'apprend qu'il est tenu par la belle-soeur de Georges (on reste en famille) qui sert une nourriture bonne et bon marché (Foutou sauce au boeuf et queue de boeuf - délicieux, on dirait un peu des pieds de veau), nous quittons rapidement la ville et, au bout de quelques kilomètres, nous voilà rendu dans un bar de périphérie. en fait, il s'agit d'une buvette entourée de quelques tables éparses, d'un poulailler et d'un barbecue, caché de la route par la buvette. Là, Georges me présente ses "frères et cousins". L'affiliation, une fois expliquée, est évidente ("c'est le petit frère de ma belle soeur" - "c'est le cousin de la tante de ma nièce par alliance", etc.) et nous buvons à la santé de la famille (ce qui fait beaucoup de monde, j'en conviens). La discussion s'installe. On parle de la mort (bizarre, pour des gens si vivants) et de la façon de ne pas y penser (Ah, je me disais aussi !), de la famille africaine aussi, mais en fait toutes les conversations reviennent sur le sujet brûlant d'actualité : la Côte d'Ivoire. Comment les populations burkinabées, implantées là-bas pour y fournir la main d'oeuvre que les ivoiriens semblent incapable de fournir, se font chasser du territoire qu'ils ont aidé à maintenir et développer, comment ce président fantoche, non élu, va finir misérablement au TPI, et comment ce jour-là le Burkina Faso fera la fête ... Bref, ici aussi, la politique déchaîne les passions.

Au cours de la conversation, un homme se lève et part chercher une volaille dans le poulailler. Distraitement, je le regarde faire. Vu la façon dont il traite la poule, celle-ci a des soucis à se faire. Son cri, d'ailleurs, semble confirmer qu'elle a compris ce qui allait lui arriver. Impression confirmée lorsque, tout-à-coup, le bruit d'une arme tranchante s'abattant sur un billot de bois coïncide avec l'arrêt brutal des caquètements ... Comme tout ceci s'est déroulé dans mon dos, je n'ose me retourner, de peur de découvrir le spectable morbide que j'imagine. Il faut vous dire qu'ici, le poulet est très apprécié des burkinabé. Ils l'utilisent pour tout : pour manger, bien sûr, mais également dans tous les rites animistes, quels qu'ils soient : sacrifice, augure, préparation de potions, soins aux malades, remerciements ... Oui, vraiment, le poulet est l'ami du burkinabé. Par contre, je doute que ce soit réciproque.

Quelques minutes après, un agréable fumet me parvient. J'ai eu beau manger il y a moins de 3 heures, cette odeur me donne faim. Miracle : devant moi apparaît un plat contenant les parties nobles de la volaille ! Je lance un regard interrogateur à Georges qui me répond : "C'est pour toi, en ton honneur". Je me sent gêné pour la poule qui n'avait rien demandé, mais ma compassion pour le volatile laisse très vite la place à un féroce (quique parfaitement illusoire) apétit. Je mange donc et partage avec mes nouveaux amis les morceaux de la bestiole. Sûr, je n'aurai plus faim ce soir ... Mangeons donc prudemment. Las ! La bête est délicieuse et le piment du diable qui l'accompagne font leur chemin tout seuls dans mon estomac. Tant pis ! Je verrai bien ce soir. Il est 17h30 et je m'attable dans 2 heures ... J'ai connu pire.

Après quelques chopines bien fraiches d'une bière blonde (la Flag) rappelant un peu notre Heineken, je me sens bien. Je devise gaiement et, comme à mon habitude, capte l'attention polie de mes hôtes. Je ne saurai pas grand-chose d'eaux, si ce n'est leur nom dont je n'ai retenu aucun. Par contre, ils doivent tout savoir de mon projet de voyage et de son avancement. C'est ainsi : le burkinabé possède également une oreille patiente. Il est déjà 19 heures et Georges me rappelle à l'ordre : il faut y aller. Un dernier au revoir et nous revoilà roulant vers Bobo.

De retour à la chambre, j'ai juste le temps de me changer que, déjà, on frappe à ma porte. Tanguet Ouattara. Nous partons chez lui. Il fait le "carème" musulman (c'est ainsi qu'ils le nomment) et me propose de reompre le jeûne avec lui. Ceux qui ont suivi le début de mes aventures savent ce que ça veut dire : de la nourriture à profusion. J'appréhendais la table, et j'ai été servi : à profusion. Salade oeufs et crudités (une râreté, ici), poulet (hé hé !), pommes frites (en l'honneur du goût français !), allocos (ça ressemble à de la banane, mais c'est beaucoup moins sucré et bien plus gras), harricots verts ... Ca n'en finit plus. Je ne peux pas finir et j'ai peur d'une réflexion de la part de mon hôte. Pensez donc ! Il n'a absolument rien manifesté. Et s'il avait été choqué, il n'en n'a rien laissé paraître et, au contraire, m'a invité à remettre ça le mercredi suivant. Après une soirée très agréable, il me ramene à ma chambre. Je m'écroule. Demain, c'est dimanche. J'irai voir la cathédrale. Quelle heure m'a dit Georges ? 7 heures ou 9 heures ? Hmmmm. Ce sera 9 heures.